Compléments généraux sur la fiscalité,
par Max Stellmacher

(Ce texte reprend de nombreux points du rapport de M. Bourguignon du conseil économique et social)

Les motivations de la réforme : Un Constat de crise.

Si la France reste un pays riche, elle est néanmoins victime d’une crise longue et persistante. Les manifestations de cette crise sont d’une part un taux de chômage élevé d’autre part une croissance molle et inférieure à celle de nos concurrents les plus performants.

Si notre taux de chômage se situe au niveau de 10%, il est inférieur à 6% non seulement aux Etats Unis et au Royaume Unis, mais aussi dans des pays ayant une forte protection sociale comme la Hollande ou la Suède. Quant à notre croissance, la persistance d’un taux de croissance inférieur à celui de notre voisin Britannique nous a fait rétrograder d’une place dans la liste des grandes puissances du monde.

Or depuis plus de vingt ans, la lutte contre le chômage et la relance de la croissance sont parmi les priorités de nos gouvernements. Il y a-t-il une fatalité ou toutes les solutions n’ont pas été explorées ? L’examen de ce qui a été réalisé chez non voisin, nous laisse optimiste. La clé de leur succès provient d’une véritable libéralisation de leur économie. Si cette libéralisation peut avoir un coût social insupportable, nos voisins du nord nous montrent qu’il est possible de la réaliser dans le cadre d’une protection sociale efficace. Pour réaliser ce miracle, il faut changer le point de fonctionnement de notre économie et donc réformer la pièce principale de notre système : le système de protection social et la structure de nos prélèvements obligatoires.

Les valeurs que nous défendons sont la trame de notre projet de réforme des prélèvements obligatoires :






Les objectifs que nous nous fixons sont :



Comment construire sur ces valeurs notre système fiscal et social.

Notre système doit être :


Il faut toujours garder à l’esprit que la façon dont on prélève l’impôt et dont on redistribue l’aide sociale influe directement sur la richesse totale.


Notre système de prélèvements obligatoires (PO) est complexe, et le fait de changer un paramètre influe souvent sur les autres. C’est pour cela que nous proposons d’isoler les grandes fonctions de notre système fiscal et d’affecter de façon indépendante les contributions correspondantes.


Les quatre fonctions de notre système de prélèvement obligatoire.


  1. La fonction de redistribution.

Cette fonction a pour but principal de niveler les inégalités de revenu entre les citoyens. Cette fonction est actuellement assurée par la fiscalité directe sur le revenu, dès lorsque l’on y intègre la partie négative correspondant aux transferts (RMI – allocation)


  1. Le financement des dépenses publiques générales.

Ceci correspond aux salaires des fonctionnaires pour assurer les missions de l’état (police éducation armé etc..) et à l’investissement collectif (routes bâtiments publics)


  1. Le financement des assurances sociales

Ici on fera la différence entre les assurances fonctionnant selon le système normal d’assurance (la prime est proportionnel au risque) ceci concerne les assurances chômages et les assurances vieillesses (retraite) (on parlera d’assurances commutatives) et les assurances ayant une fonction distributive comme l’assurance maladie (on parlera d’assurances distributives)

Pour illustrer notre propos : les cotisations sociales sont proportionnelles au revenu. Quand le salarié part à la retraite ou est au chômage il perçoit une allocation qui est fonction de son ancien salaire (donc proportionnel à ses cotisations). Ceci est le fonctionnement normal d’une assurance (plus on cotise plus on obtient de remboursement quand le risque se réalise). Par contre quand le salarié contracte une maladie, les dépenses de soin remboursées n’ont aucun rapport avec son salaire.


  1. les incitations fiscales et régulations.

Ici il s’agit notamment d’écotaxe ou d’impôt incitatif comme la taxe d’apprentissage. On pourrait ajouter tout un ensemble de surimposition pour rendre les entreprises plus verseuses (surimposition pour les entreprises qui multiplient le travail précaire etc)



Il ne s’agit pas de supprimer l’universalité de l’impôt, mais de séparer de l’impôt au sens classique du terme qui sert à faire fonctionner l’état (qui reste régie sous le principe de l’universalité) des autres fonctions et prélèvements obligatoires.


L’affectation des instruments fiscaux qui correspond à ce découpage est-elle satisfaisante ? Si l’on résume celle-ci à l’idée que la redistribution délibérée passe essentiellement par l’imposition directe (généralisée), les autres prélèvements, étant approximativement neutres, la réponse de la théorie économique (Cf. complément d’Helmuth Cremer.) dans le cadre de comportements simplifiés et de marchés parfaitement concurrentiels serait probablement affirmative. Un théorème important de la théorie des finances publiques dû à Atkinson et Stiglitz dit précisément que, en présence d’un impôt optimal sur le revenu (au sens développé par les travaux de Mirrlees) il est optimal que la fiscalité indirecte soit neutre du point de vue distributif, c’est-à-dire qu’elle soit utilisée au seul financement des dépenses publiques. Dans ce cadre, l’impôt sur le revenu doit évidemment être entendu dans le sens impôt avec sa composante négative soit, un dispositif au sein duquel prélèvements progressifs sur le revenu et transferts s’équilibrent. Une augmentation de la redistribution est possible à enveloppe budgétaire donnée, et elle se fait indépendamment des autres fonctions.


Raisonner en termes fonction séparées conduit également à prendre conscience du fait qu’une hausse de la partie proportionnelle de la fiscalité du revenu (la CSG par exemple) ne va pas nécessairement à l’encontre de la progressivité lorsqu’elle équilibre une extension de la partie négative de l’ISR (fonction redistribution). Par ailleurs, un tel cadre offrirait l’avantage de clarifier le débat sur le montant des prélèvements obligatoires et la redistribution en rendant les termes indépendants les uns des l’autres. Comme il est possible de modifier la progressivité de l’ISR à enveloppe budgétaire constante, le débat pourrait en effet se concentrer sur les seules performances redistributives du système au lieu de se concentrer sur la hausse ou la baisse du taux de prélèvement global.


Une autre vertu de cette séparation la garantie d’efficacité des mesures incitatives. En effet si on finance des dépenses courantes avec des écotaxes au lieu de financer uniquement l’effet de la pollution (pollueur = payer), on risque à terme d’aboutir au mécanisme suivant : Dans un premier temps les pollueurs diminuent leur pollution, mais comme l’écotaxe finance des dépenses récurrentes (les 35 heures par exemple), l’état ayant besoin de cet argent diminue les seuils de pollution en fonction de la diminution de la pollution. Ainsi les pollueurs voient que plus ils baissent leur pollution plus le résiduel de pollution est taxé, donc ils ne gagnent rien à poursuivre la réduction de leur pollution.

Proposition de prélèvements obligatoires pour les quatre missions de l’état (pour les prélèvements principaux).

Fonction redistribution.

1) ISR

Cette fonction est assurée par un impôt unique : l’impôt sur le revenu progressif et le revenu citoyen. On appellera cet impôt l’impôt de solidarité sur le revenu (ISR).

L’objectif est de diminuer la distribution « naturelle » des revenus pour réduire les écarts. Cette fonction est actuellement essentiellement obtenue par l’existence du SMIG, du RMI et d’un impôt progressif.

Le plus simple est de donner à tous les citoyens un revenu minimal, d’une somme M. de la façon suivante :

Un revenu citoyen

Y compris les millionnaires, les étudiants les chômeurs etc. (Rq pour éviter les étudiants «  à vie » une partie de ce revenu citoyen serait repris par des frais de scolarité)


Attention : pour que ce système soit efficace, il ne faut pas qu'il soit mis en complément de ce qui existe mais en remplacement. Tout le système d'aide sociale doit être fondu dans le nouveau système. Cela signifie notamment que la garantie du revenu minimum n'est plus du domaine de l'entreprise et implique la suppression du SMIG. Le but recherché est l'abaissement du coup fixe du travail pour diminuer le chômage et l'inactivité, l'économie du fonctionnement de l'Etat en regroupant sous un système unique les fonctions de prélèvement et répartition de la richesse, et surtout de permette à tous d'avoir une activité, garantie d'une insertion dans la vie de la cité.


D’autre part chacun paye sur tous ses revenus nets (revenu brut moins cotisations sociales et impôt direct proportionnel) un impôt progressif avec trois tranches qui équilibre le système.

0- 2M taux T (estimé à 13.5%)

2 M-4M taux à 2T

4M- +taux à 4T

Ainsi à partir d’un certain niveau ce salaire, le montant de l’impôt progressif est supérieur au revenu universel. Le contribuable devient un contributeur net. L’avantage de ce système de redistribution par rapport au système de l’impôt négatif direct (ce qui correspond à donner ou percevoir directement la différence entre le revenu minimum et la contribution de l’impôt) est le suivant. Le fait que l’on soit un contributeur net ou pas n’apparaît pas directement, ainsi on évite en partie des problèmes psychologiques de se sentir dans la population des exclus et des assistés. On rentre et surtout on sort de cette partie de la population sans formalité.

Cet impôt serait directement prélevé à la source en fonction de la déclaration de chaque citoyen (système comparable à celui au Etats-Unis).


Le financement des dépenses publiques générales.

  1. IR proportionnel

On peut garder un impôt proportionnel (non progressif) basé sur tous les revenus. Ceci pour impliqué davantage le citoyen à la bonne gestion de l’état.

Le taux (estimé à 7% pour un produit de 50 milliard €) pourrait être divisé entre un taux national et un taux régional. (Dans une marge de variation contrôlée par le parlement national pour éviter une trop grande distorsion). Cet impôt serait directement prélevé à la source.

De plus il serait possible qu’une fraction (10%) serait au choix versée au fisc ou a une association désignée par le contribuable (association, église ou organisme d’état)


  1. IS.

L’impôt sur les sociétés est maintenu. En effet, d’un point de vue économique, on a tendance à ne considérer l’entreprise que comme une entité légale, dont il conviendrait de taxer l’activité directement sur le revenu des personnes physiques qui en bénéficient (détenteurs de capital, consommateurs, salariés). Le principal fondement de l’impôt sur les sociétés selon la théorie économique est le fait qu’il permet d’effectuer des prélèvements à la source sur des revenus qui, dans le cas contraire, échapperaient à la fiscalité. En effet, comme les systèmes fiscaux ne taxent que les gains en capitaux réalisés, les investisseurs pourraient alors soustraire une partie de leur revenu à la fiscalité en réinvestissant les bénéfices dans les entreprises non assujetties. Dans cette perspective, l’assiette de l’impôt sur les sociétés devrait être très étroite, et se limiter aux bénéfices réinvestis, les dividendes étant déjà taxés au niveau des revenus individuels des actionnaires.

Plusieurs arguments expliquent toutefois que, dans la plupart des systèmes fiscaux, les dividendes soient taxés. En particulier, on peut estimer qu’une déductibilité des dividendes conduirait à réduire considérablement le montant des taxes collectées auprès des investisseurs étrangers et à une délocalisation des sièges sociaux.

Le taux devra être ramener dans la norme européenne (25%) avec là aussi un taux pouvant être divisé entre un taux national et un taux régional toujours sous le contrôle du parlement.


  1. La TVA.

La TVA se caractérise d’abord par son rendement élevé : 1997, 7,9 % du PIB, 17,2 % des prélèvements obligatoires, 50,5 % des prélèvements d’État.

C’est plus de deux fois le rendement de l’impôt sur le revenu, plus de trois fois celui de l’IS. Son coût de collecte est comparativement faible, et elle a été largement adoptée en Europe et hors d’Europe.


Depuis l’élimination du taux majoré, il y a en France deux taux de TVA, le taux normal à 19,6 % auquel la plupart des biens et services consommés par les ménages sont assujettis, et le taux réduit à 5,5 % pour la plupart des produits d’alimentation, les transports, le livre et l’hôtellerie. Il faut y ajouter le taux super-réduit à 2,1 % et les dépenses exonérées de TVA (loyers, services bancaires et d’assurance, services de santé). En comparaison des autres pays européens, la France se caractérise par un taux normal relativement élevé et par un écart important entre taux normal et taux réduit. Les critiques à l’endroit de la TVA portent principalement sur son caractère anti-redistributif.


La manipulation des taux de TVA n’est pas un bon instrument de redistribution, est ne doit pas être le canal privilégié par lequel la fiscalité doit intégrer les considérations macroéconomiques. C’est un argument supplémentaire pour concentrer toute l’action redistributive de l’impôt sur ISR.

Dans ces conditions, il faut sans doute se résoudre à considérer la TVA comme ce qu’elle est : un impôt à rendement élevé, simple à gérer, plutôt bien accepté, et compatible avec une intégration internationale accrue.


C’est, avec les effets qu’on en attend sur l’emploi, ce qui fonde les propositions de baisses de taux. Une autre préoccupation a trait aux conditions de la concurrence au sein du marché intérieur européen.

Le Taux devra donc être le plus bas possible surtout pour les produits liés à des services gourmands en mains d’œuvre. La diminution du taux ne résultera que de la réforme de l’état et de l’amélioration de la productivité de ce dernier.


  1. La TIPP.

A ce niveau, la TIPP ne semble pas devoir être réformée. Il est juste à noter que au moins pour une partie la TIPP apparaît aussi comme un impôt de régulation (écotaxe sur l’émission de CO2)


  1. Autres

Les autres prélèvements (surtout la fiscalité locale) fera l’objet d’une autre étude.



Le financement des assurances sociales.

Assurances distributives : L’assurance maladie.

L’assurance maladie ne fonctionnement pas comme une assurance : la prime (la cotisation) n’est pas proportionnel au risque (probabilité et coût de la maladie).

De ce fait l’assurance maladie ne peut pas être directement confié à des assurances privées.


Le meilleur système sera donc le plus simple et le plus équitable. L’assurance maladie doit financée une caisse primaire unique par une contribution universelle (c'est-à-dire basculer sur la seule CSG les contributions maladies). Le taux peut être estimé à 18-20%.

En plus seront versées à cette caisse les taxes sur le tabac et l’alcool.


Cette caisse financera :

1 l’infrastructure médicale (les hôpitaux le personnel hospitalier etc)

2 les remboursements primaires.

Les remboursements primaires seront dégressifs en fonction du revenu de chacun (basé sur la déclaration de l’ISR). Ainsi pour les plus pauvres le taux sera proche de 100% et pour les plus aisés un taux de l’ordre de 50% (sauf pour les traitement lourd et opérations vitales)

Ces remboursements seront versés à la mutuelle qu’aura librement choisi l’assurée.


Complémentaire à ce système des mutuelles viendront compléter les remboursements. Du fait que les plus pauvres sont remboursés presque qu’a 100 % le coût pour ces derniers de la mutuelle sera quasi nul.

La caisse primaire remboursera de façon globale les mutuelles et les mutuelles rembourseront les assurés. L’intérêt de ces mutuelles privées est d’administrer de façon efficace (car concurrentielle) les dossiers, de gérer les remboursements et de contrôler efficacement le système de soin (il est toujours plus sain que celui qui contrôle ne soit pas lié à celui qui agit). L’inscription dans une mutuelle sera obligatoire mais le choix sera libre.


Assurances commutative : L’assurance chômage et les retraites.

Retraite

Chaque personne ayant suffisamment cotisé ou ayant atteint un certain age reçoit grâce au système de répartition un revenu minimum de l’ordre de 2M (voir ISR).

Etant donné que la solidarité garantit un minimum aux personnes âgées par répartition, le complément peut être géré par des mutuelles ou assurances privées avec un contrôle et une garantie d’état. Ce complément doit prendre la forme d’une capitalisation librement choisie par chaque contribuable déductible du revenu (pour l’ISR). Le capital doit être garanti (sur-assurance des organismes financiers) être géré par des organismes (mutuelles ou assurances) indépendants des entreprises où travaillent les contribuables (pour ne par perdre et son travail et sa retraite comme dans le cas Enron). Le système doit évidement être contrôlé par l’Etat (comme le sont d’ailleurs tous les organismes financiers).

Chômage

Même fonctionnement que la retraite. D’abord chacun à un niveau d’assurance garanti (le revenu universel). Le complément doit être géré par des mutuelles ou assurances privées avec un contrôle et une garantie d’état.

On peut envisager qu’un fond complémentaire soit utilisé pour alléger les cotisations chômage. Ce fond serait alimenter par une surtaxe de l’impôt sur les sociétés qui aurait un comportement favorisant le chômage (travail en CDD intérim, plan sociaux récents etc.)


N.B Le prélèvement impôt sur le revenu et contribution maladie se faisant à la source, les sommes collectées pour l’assurance retraite et chômage peuvent être soumises à cet impôt. L’état redonnera ces sommes perçues aux assurances et mutuelles pour être redonnées aux assurés.


  1. Les incitations fiscales et régulations.


Dans cette catégorie rentre une série de mesures fiscales variée. On ne peut ici pas en faire la liste compète.

Les grandes mesures qui doivent rentrer dans cette catégorie sont :


Les sommes collectées doivent servir uniquement à lutter contre les effets du comportement taxé.

Par exemple avec l’écotaxe sur le carburant pour payer la plantation de forêt piégeant le CO2, la recherche pour de nouvelles formes d’énergies (biomasse etc. ) ou de nouveaux vecteurs d’énergie tel que la pile à combustion d’H2.

La surtaxe des entreprises qui licencient sera versée sous la forme d’un fond pour l’assurance chômage.

Il serait contre productif d’utiliser ces sommes pour le financement de dépenses récurrentes car l’objet de ces taxes est de faire disparaître certains comportements ou conséquences de notre système économique. L’écotaxe pour être incitative doit disparaître avec la pollution.

Conclusion

Cette réforme des prélèvements obligatoires ne change peu la philosophie réelle de notre système fiscal et social. Par contre en clarifiant et surtout en simplifiant notre système on est en droit d’espérer une réelle économie de fonctionnement (surtout pour le système de répartition) et une meilleur efficacité. Ceci est la clé pour pouvoir atteindre des taux de chômage de nos voisins les plus compétitifs (Suède Hollande et Angleterre)




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